SA PROMOTION
“A good instrument wants to be conquered; it does not present itself unguarded.
It expresses painfully every mistake and rewards the touch of a true master gracefully.”
Bien sûr !
Fabriquer une guitare de concert est tout un art mais il est tout aussi difficile d'en faire la promotion.
Le "son", on l'a vu, est le résultat d'un "couple" Guitariste/Guitare.
Or, dans le cas d'un essai, ce couple bien sûr n'existe pas (ou pas encore!).
Un concertiste a ses habitudes, ses préférences, ses rêves aussi. Sur son instrument, il se sent "chez lui", il sait faire de la bonne musique avec "sa vieille bonne guitare" même lorsqu'il lui reconnaît quelques défauts.
Il aimerait éventuellement trouver des choses en plus ou d'autres en moins… mais avec "presque le même" instrument.
Comment aborde t'il alors un l'instrument inconnu qu'un Luthier lui présente ?
En premier il va essayer d'y retrouver une musicalité, celle qu'il connaît; il va entendre des choses nouvelles qui lui manquaient sur sa guitare, cela va lui plaire, mais il ne va pas arriver à TOUT retrouver… en tous cas, pas tout de suite et pas de la même façon
Un instrument ne se révèle pas au premier contact.
C'est déstabilisant.
…"Je me rend bien compte de la difficulté que représente pour le guitariste le fait de comparer un instrument inconnu avec le sien, évidemment bien connu.
Il faudrait oublier jusqu'à l'existence du connu, pour ensuite pouvoir expérimenter réellement l'inconnu et enfin pouvoir comparer.
Ainsi le premier "essai" lors de la première rencontre s'arrête souvent là, même s'il est globalement positif, même si la guitare présentée se serait peut-être révélée "bien meilleure" ….toutefois, elle a pourtant laissé une trace qui parfois fait son chemin..
…bien sûr le coup de foudre existe aussi et il est même fréquent… je le prends comme un cadeau, comme une évidence mais je ne peux commercialement m'en remettre à un hasard bienheureux ..! "
Quelle démarche le Luthier peut- il avoir pour faire correctement sa promotion ?
Il lui faut exister dans la durée, être présent sur le long terme en toutes occasions.
La démarche de Michel Donadey est de permettre au guitariste de percevoir ce qu’il pourrait exploiter de nouveau sur la guitare qu'il lui présente, de lui donner l'occasion de pressentir les particularités de son comportement futur en créant les conditions les plus favorables à une bonne écoute.
"…Parfois des élèves m'ont acheté une guitare et le professeur a suivi dans l'année !
L'élève m'a ainsi permis d'avoir une présence continue auprès du professeur qui a pu découvrir tranquillement un instrument de ma fabrication. Lorsqu'il s'intéresse ensuite à une de mes Guitares, le terrain n'est plus vierge.
…mais, la plupart du temps il me faut entrer dans un véritable travail de promotion…"
Michel Donadey accorde une importance toute particulière à cette démarche et s’y consacre, depuis fort longtemps, avec pas mal d’originalité.
La « PUB » ne vient qu’ensuite, pour la diffusion de l'information et Michel Donadey l’utilise à de véritables fins de communication.
Voici une anecdote qui illustre bien ce propos :
Dans le dernier N° des "Cahiers de la Guitare" (N°84 du 4 ième trimestre 2002)…
Eric Franceries faisait la page de couverture et sa guitare (Donadey Crs114 de 1997) y était bien en vue, il en parlait aussi dans son interview…
"D. Ribouillault, rédactrice en chef de la revue, me demanda de souscrire une publicité dans la page réservée intitulée : "Carrefour des Luthiers".
Or, cet encart spécialisé me rebutait : l'aspect figé de sa présentation était à l'opposé de ma conception de la "communication"….
C'est alors que j'ai eu l'idée d'utiliser cette photo de ma fille accompagnée de ce seul commentaire: "une Donadey, ça grandit…! (Je ne voulais même pas mettre mes coordonnées !)… je communiquais ainsi sur l'avenir, le progrès, le développement, ainsi que sur le lien humain avec la musique, sur la beauté naturelle, sur l'espoir.
J'en ai parlé avec Danielle Ribouillault (elle même "maman") et elle m'a donné un feux vert enthousiaste.
Bien des guitaristes ensuite, Roland Dyens en premier, m'ont félicité : cette fois cette page leur avait sauté aux yeux, ils n'avaient même vu "que ça".
Michel a donc évidemment utilisé la presse comme moyen de diffusion d'informations techniques ou artistiques mais aussi en essayant d'y communiquer son esprit original.
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Question promotion, les Stages et Master class …
…sont les plus sympathiques des moyens dont un luthier dispose pour montrer ses guitares dans les bonnes conditions de détente et de concentration, d’écoute et d’étude qui y règnent. Les comparaisons avec une large gamme d’instruments y est facilitée, les élèves viennent de tous horizons, ils sont curieux et les professeurs se prêtent avec intérêt à ces échanges.
Un Luthier qui débute a peu de chance de se faire connaître s'il reste à son Atelier à attendre un client éventuel !
… il lui faut devenir un "V.R.P." pour ses guitares !
Pendant de nombreuses années, Michel partait ainsi faire "sa tournée" lors des stages de printemps et d'été ...à l'époque, personne n'avait encore appliqué cette idée de manière aussi systématique !
Il avait aménagé sa vieille "Ami 6" pour pouvoir y dormir! (ce n'était pas une "Alpha Roméo", mais une "A la Romano" ! lui a t'on dit un jour !
Et il apportait ses guitares dans chaque stage festival ou master class.
Il garde de ces "tournées" un bon souvenir de jeunesse, preuve de son engagement ..
"….C’est le côté vacances d’études de mon métier ! "
j’ai ainsi rencontré, en 20 ans, bon nombre de concertistes qui font vivre la Guitare.
j’y puise ma nourriture pour mes journées d’hiver à l’Atelier, cela alimente mes désirs de création, crée des idées nouvelles, donne une direction, un axe à mes investigations futures.
J'ai eu la chance par la même occasion d'assister à de nombreux Master class, d’esprits très différents en tant qu'auditeu r, ce qui m’a permis de parfaire mon éducation musicale, de former mon oreille à d’autres écoutes, de me désenclaver de la sonorité majoritairement dominante dans mon entourage géographique.
j’y ai aussi rencontré d’autres luthiers dont beaucoup, étrangers, qui m’ont permis de découvrir des sonorités différentes, un autre monde musical, d'autres techniques de construction, me permettant de prendre une nouvelle orientation dans ma propre fabrication..."
"…j'ai une petite anecdote bien édifiante dont j'ai tiré leçon à raconter ici.
Elle illustre parfaitement la subjectivité de tout ce qui concerne nos jugements sur une guitare :
...J'étais en visite (toujours bien reçu) lors d'un stage encadré par Gérard Verba, avec Tania Chagnot, Alain Miteran et le directeur de recherches en acoustique instrumentale au CNRS : Charles Besnainou.
Gérard a proposé cette petite expérience :
Tout le stage (25 personnes) s'est réuni dans une grande pièce; Gérard et Tania ont joué leurs propres guitares ainsi qu'une des miennes et une autre guitare de Luthier… les 4 numérotées de 1 à 4. Chaque Guitare a été jouée par les 2 guitaristes dans un ordre différent, par 2 fois.
La salle leur tournait le dos et chacune des 25 personnes avait un tableau à remplir avec 4 lignes (les 4 guitares) et des colonnes pour noter les impressions entendues (...puissance, volume, basses, qualité du timbre, clarté, rondeur du son etc…) ainsi qu' une ligne subjective pour que chacun note sa préférence et l'explique.
Nous nous attendions à voir les guitares habituelles des concertistes arriver bien en avant des autres guitares, mieux notées et surtout mieux jugées, d'autant plus qu'ils les jouent parfaitement, les connaissant complètement.
Mais, à notre grande surprise ! cela a été l'inverse !
Bien sûr, il aurait fallu faire un essai sur la longueur d'un concert complet, mais déjà l'expérience à été fructueuse quant aux questions qu'elle pose de façon objective.
Il nous fut étonnant aussi de constater qu'une des élèves, qui m'avait dit auparavant ne pas être attirée par ma guitare parce qu'elle était trop froide pour elle, l'avait, lorsqu'écoutée de dos, notée comme la plus chaleureuse, avec une note bien supérieure aux autres… Elle en a été toute déstabilisée… (il faut dire que sa couleur de vernis sans coloration lui donnait un aspect clair… et que cette guitare sensible était chaleureuse lorsque - et peut-être parce que - jouée par Gérard et Tania…).
Bref, la question de base a été bien posée à savoir :
à quoi tiennent nos choix, nos impressions ?
J'ai alors compris que la subjectivité est l'élément principal qui va décider telle ou telle personne à choisir telle ou telle guitare… et que l'importance principale de l'instrument n'est pas dans sa qualité objective mais dans le ressenti du guitariste.
Pour lui, bien des facteurs interfèrent alors et passent avant la qualité objective car il désire avant tout jouer un instrument avec lequel il "se sent bien".
En fait nos guitares sont des objets d'art qui ont des qualités et des défauts objectifs, mais avant tout, pour les concertistes, ce sont des "outils" à faire de la musique… ce qui nous rend, à nous Luthiers, un peu de modestie !
Pour moi, l'enseignement que j'en ai tiré est double :
- Pour juger un instrument que je viens de terminer je dois le faire essayer par plusieurs personnes différentes et en tirer moi-même des conclusions par ma propre écoute sans être déstabilisé par ce qu'on m'en dit, tout en le prenant en compte.
- Promouvoir ses instruments est avant tout un travail de relation, de contact à établir, de confiance à donner qui s'ajoute à la qualité objective de l'instrument.
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Ces rencontres, Michel essaye de les prolonger, en vous donnant rendez-vous à l’une ou l’autre exposition à laquelle il participe, car…
...Montrer des guitares, c’est surtout les donner à entendre…
… et il n’y a pas de meilleures conditions que celles, réelles, du Concert.
Michel y a oeuvré pendant les 15 années où il a participé à MUSICORA en décidant les Guitaristes à donner un Récital sur ses instruments, et cela, en créant un événement médiatisé :
Tania Chagnot, J.B. Dautaner, F.Tomasi, Boulou Ferré, Michel Sadanowski…
Parfois même, repris en direct par Radio France :
- ARNAUD DUMOND en 1985
- ROLAND DYENS en 1987 pour le centenaire VILLA LOBOS
- La rencontre Arnaud Dumond/Pedro Bacan
- La création « leçon des ténèbres » (A. Dumond)
- ROBERTO AUSSEL en 1997
Il n’existe, pour un Luthier, aucune meilleure démonstration que celle qui est donnée par un concertiste ayant adopté son instrument et qui l’exploite à merveille… c’est son meilleur ambassadeur…
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Ainsi, avec le temps et l’expérience, se crée tout un réseau de relations et de complicités, qui donnent au Métier sa dimension sociale.